Néanmoins, le législateur, le pouvoir réglementaire et le juge sont intervenus pour protéger les agents.

En effet, aux termes de l’article L. 1225-1 du Code du travail :

« L’employeur ne doit pas prendre en considération l’état de grossesse d’une femme pour refuser de l’embaucher, pour rompre son contrat de travail au cours d’une période d’essai ou, sous réserve d’une affectation temporaire réalisée dans le cadre des dispositions des articles L. 1225-7, L. 1225-9 et L. 1225-12, pour prononcer une mutation d’emploi.

Il lui est en conséquence interdit de rechercher ou de faire rechercher toutes informations concernant l’état de grossesse de l’intéressée ».

Il résulte de ces dispositions que la circonstance qu’une femme soit enceinte ne doit pas avoir d’effet sur son éventuel recrutement, sur sa période d’essai ou sur son contrat.

Ces dispositions ont été consacrées comme étant un principe général du droit et sont donc applicables aux agents publics.

Ainsi :

« Le principe général posé par les dispositions précitées de l’article L. 1225-1 du code du travail qui interdit de licencier une femme salariée en état de grossesse, s’applique aux femmes employées dans les services publics lorsqu’aucune nécessité propre au service ne s’y oppose » (CAA Marseille, 2 février 2016, n°14MA05027 ; CAA Versailles, 19 décembre 2013, n°12VE04071).

Ce principe a d’ailleurs été repris expressément par les dispositions du décret n°91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l’article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière dans les termes suivants :

« Aucun licenciement ne peut être prononcé lorsque l’agent se trouve en état de grossesse, médicalement constatée, ou en congé de maternité, d’adoption ou de paternité, ou pendant une période de quatre semaines suivant l’expiration de ces congés (…) Les dispositions des deux alinéas précédents ne sont pas applicables en cas de licenciement à titre de sanction disciplinaire ou si l’établissement employeur est dans l’impossibilité de continuer à employer l’agent pour un motif étranger à la grossesse, à l’accouchement, à la naissance ou à l’adoption » (article 45).

En outre, l’article 7 du même décret assimile la rupture du contrat en cours ou en fin de période d’essai à un licenciement.

Dans ces conditions, mettre fin à une période d’essai ou licencier une contractuelle enceinte est illégal sauf licenciement pour faute ou nécessité de service faisant obstacle à son maintien en fonction pour un motif étranger à la grossesse.

La jurisprudence est plutôt protectrice des agents sur cette question. Ainsi, il a été jugé que :

« Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que Mme A a été recrutée le 13 février 2006 par la COMMUNE DU VESINET par un contrat d’une durée d’un an assorti d’une période d’essai de trois mois ; (…) Considérant que la COMMUNE DU VESINET soutient que la décision attaquée a été prise au motif que Mme A, recrutée pour exercer les fonctions d’aide auxiliaire dans une crèche de la ville, ne présentait pas les qualités requises pour le poste ; que pour justifier de la réalité de ce grief la commune produit un rapport rédigé le 24 mars 2006 par la responsable du service de la petite enfance faisant état de divers manquements de Mme A ; que ce rapport, tant dans les termes généraux dans lesquels il est rédigé que dans les circonstances dans lesquelles il est intervenu, soit quelques jours après que la commune a eu connaissance de l’état de grossesse de Mme A, ne permet pas de tenir pour établie l’insuffisance professionnelle alléguée d’autant que cette dernière n’a exercé ses fonctions que sur une période de douze jours ; que, par suite, la décision attaquée doit être regardée comme prise en considération de l’état de grossesse de Mme A ; qu’elle doit, pour ce motif , et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens, être annulée ; » (CAA Versailles, 17 juin 2010, n°09VE00443).

Ou encore : « 3. Considérant qu’il résulte de l’instruction que, dans le cadre de ses fonctions au service du centre hospitalier Le Raincy-Montfermeil, Mme A…n’a pas donné satisfaction dans la réalisation des tâches qui lui étaient assignées ; qu’à l’exception de l’évaluation effectuée en septembre 2008, soit cinq mois après son entrée en fonctions, les évaluations rédigées en 2011, après une longue période d’absence de l’intéressée, ont été défavorables ; que la fiche d’évaluation rédigée en mars 2011 dresse, notamment, un bilan négatif notant que Mme A…n’a pas  » prouvé avoir les  » atouts (…) suffisants pour occuper ce poste …  » ; qu’un document rédigé par sa supérieure hiérarchique daté du mois de mars 2011 note que, malgré  » un sérieux et la volonté de bien faire « , Mme A… » n’a pas les capacités nécessaires pour assumer les fonctions qui sont les siennes. Fonctions qu’elle a acceptées lors de son recrutement. (…) les projets qui lui ont été confiés n’ont pas permis d’obtenir les résultats escomptés (…) ma position est qu’elle ne peut continuer d’occuper ce poste.  » ; qu’enfin, un document daté du 10 juillet 2011 revient sur les insuffisances du travail de la requérante et notamment sur son incapacité à régler les problèmes techniques auxquels elle s’est trouvée confrontée ; qu’ainsi, l’insuffisance professionnelle de Mme A…doit être regardée comme établie par les pièces du dossier ;

4. Mais considérant que, par une lettre en date du 12 septembre 2011, adressée à l’administration dans le délai de 15 jours suivant l’intervention de la décision attaquée, ainsi que le prévoient les dispositions précitées de l’article 45 du décret susvisé du 6 février 1995, Mme A… a informé le centre hospitalier Le Raincy-Montfermeil de son état de grossesse ; que si l’établissement a, en dépit de ce courrier, maintenu sa décision de licencier l’intéressée, il résulte de l’instruction que les fautes professionnelles qui ont pu être commises par elle, dans le cadre des missions qui lui ont été confiées, n’ont pas fait l’objet de sanctions disciplinaires et ne sauraient être regardées comme revêtant le caractère de gravité autorisant qu’il soit procédé à son licenciement en dépit de son état de grossesse ; que son insuffisance professionnelle ne saurait davantage, contrairement à ce qu’ont estimé les premiers juges, caractériser une impossibilité de poursuivre les relations contractuelles ni constituer, à elle seule, une nécessité de service faisant obstacle à son maintien en fonctions ; qu’ainsi, la décision prise par le centre hospitalier Le Raincy-Montfermeil, à la suite de la lettre du 12 septembre 2011, de maintenir sa décision de licencier Mme A…est entachée d’une illégalité fautive de nature à engager la responsabilité de l’établissement à l’égard de la requérante ; » (CAA Versailles, 23 janvier 2014, n°12VE04211).

Dans ces conditions, dès lors que la contractuelle recrutée est enceinte, il ne peut être mis fin à sa période d’essai ou à son contrat qu’en cas de faute grave justifiant un licenciement disciplinaire ou en cas de nécessités du service faisant obstacle à son maintien en fonction sans lien avec la grossesse. En effet, tout motif lié à son état, y compris le fait qu’elle n’en ai pas informé l’employeur, rendrait le licenciement irrégulier et exposerait la personne publique à un recours devant le Tribunal administratif.

Avant tout décision hâtive du côté de l’employeur, ou si vous faites l’objet d’une fin anticipée de contrat sur fond de grossesse, contactez Maître BENOIT, associé chez Stratem Avocats au 02 47 60 12 60.

Haut de page